De plus en plus répandu dans l’enseignement supérieur, le stage fait figure de solution au problème de l’insertion professionnelle des jeunes diplômés et de modalité incontournable de « professionnalisation » des études. Ce présupposé explique largement l’inflation des stages dans les diplômes post-bac des écoles et des universités.
Un double questionnement pédagogique sur les finalités et les résultats de plusieurs centaines de stagiaires que nous avons encadrés depuis 20 ans et sociologique sur les mutations du fonctionnement du système d’emploi et des modalités d’insertion et de stabilisation professionnelles des jeunes nous a conduit à interroger la nature, l’organisation et les effets des stages. Démarrée en 2006 dans le cadre du LARGOTEC (Université Paris Est), cette recherche se poursuit au sein du RESTAG, réseau dédié à cet objet.
Les travaux sur lesquels s’appuie cette communication mobilisent différents outils de recueil de données et d’analyse :
entretiens individuels et collectifs avec des élèves et étudiant(e)s stagiaires au cours des mois précédents,
entretiens avec des concepteurs et des organisateurs de stage au sein d’écoles et d’universités, avec des responsables de ressources humaines et de responsables de l’accueil de stages dans leur organisation (entreprise, collectivité et association),
entretiens avec des représentants d’organisations professionnelles, syndicales et associatives (ANDRH, MEDEF, CGPME, CFDT, CGT-FO, APEC, UNEF, Cé, Génération précaire, Bureau national des élèves ingénieurs),
ateliers de travail regroupant des chercheurs, des praticiens du stage et des acteurs socio-économiques,
enquête par questionnaire auprès de tuteurs (qui sera suive d’entretiens) dans le cadre d’une convention avec l’APEC.
Nous présenterons une réflexion sur les obstacles que rencontrent les jeunes diplômés cherchant en emploi, puis une discussion critique sur les apports des stages en cours de formation.
Il s’agira d’abord d’examiner le diagnostic renvoyant l’insertion professionnelle heurtée des débutants à leur inexpérience et à l’inadaptation de leur formation avant d’interroger l’efficacité présumée du stage pour améliorer l’accès à l’emploi. Nous constaterons que cette utilité est plus souvent postulée qu’argumentée et évaluée, qu’elle véhicule une illusion liée à une erreur d’identification des facteurs explicatifs et une aporie renouant avec les errements adéquationnistes formation/emploi. Ce sera l’occasion de montrer que si cette approche unilatérale sous-estime la richesse et la diversité des potentiels du stage aux apports potentiels substantiels, elle conduit aussi à négliger les risques de dérives et d’abus liés à leur actuelle multiplication peu maîtrisée.