Quand Internet aide à sortir de l’ombre pour imposer un débat dans l’espace public L’exemple de Génération précaire et de la question des stages

Résumé

L’arrivée des nouvelles technologies de l’information et de la communication, Internet notamment, a conduit de nombreux chercheurs de disciplines variées (sciences politiques, sociologie, information et communication…) à s’interroger sur leur capacité à faire naître des mobilisations collectives.

Cette communication présente l’exemple de la contestation des usages abusifs des stages par le collectif Génération précaire créé par quelques personnes qui ont utilisé Internet pour se rencontrer, puis investir l’espace public au sens d’Habermas (des lieux où des citoyens organisés collectivement mènent des actions qui ont une influence sur les décisions politiques).

A la fin de l’année 2005, Génération précaire médiatise la question des stages en dénonçant leur détournement. Après un appel sur un blog personnel, des échanges sur le net conduisent à la formation d’un petit groupe d’ « activistes » qui organise plusieurs manifestations mettant en scène des stagiaires masqués afin d’attirer les médias pour sensibiliser l’opinion publique et pousser les acteurs institutionnels (pouvoirs publics, confédérations syndicales notamment) à se saisir du sujet.

Dans cette dynamique, le site qui est créé recueille en quelques semaines des milliers de plaintes de stagiaires abusés.

Quelques mois après, une réglementation se met en place à propos de laquelle Génération Précaire est reçu par les autorités gouvernementales. Aujourd’hui, ce collectif toujours actif participe au groupe de travail « Stapro » mis en place par le ministre Valérie Pécresse en septembre 2007 afin de faire des propositions pour améliorer la gouvernance des stages.

Dans le cadre d’une recherche sur le fonctionnement et les usages des stages, nous avons mené des entretiens semi-directifs avec les fondateurs de Génération précaire et nous avons interrogé un certain nombre de stagiaires ayant témoigné sur leur site. À partir de cette enquête, nous montrerons comment Internet a servi d’instrument de communication, de diffusion d’une problématique et d’organisation d’une mobilisation liée à la formation et à l’emploi.

On peut y voir une forme de « nouveau mouvement social » (au sens de Touraine) dans lequel un nombre infime de personnes a réussi à devenir incontournable dans la négociation et la construction de nouvelles règles.

Cet usage d’Internet comme outil précieux de médiatisation et de diffusion montre comment un progrès technique peut servir de vecteur à l’invention de nouvelles normativités.

Mais l’émergence d’une telle congruence n’est pas hasardeuse. Il s’agira donc dans cette communication d’exposer les conditions dans lesquelles Internet a contribué à une mobilisation collective obligeant les pouvoirs publics à légiférer sans tomber dans un déterminisme technologique.

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